"Il y a vingt-trois ans, en Angleterre. douze enfants étranges naquirent exactement au même moment. Il y a six ans, ce fut la fin du monde. Voici ce qu'il s'est passé ensuite..."
Si ce qui différencie un excellent scénariste d’un auteur hors-pair se situe dans la capacité à allier qualité et quantité pour sans cesse (et en apparence sans le moindre effort) enchaîner les titres majeurs, alors on tient (des fois qu’on en doutait) la preuve définitive que Warren Ellis est bien l’une des grandes figures de son époque.
Epoque au sein de laquelle il suit les modes puisque Freak Angels a tout d’abord existé sous
forme de web-série, publiée sur le net à raison de six pages par semaine durant
un peu plus de trois ans.
Mais il eut été dommage de se priver d’une sortie sur papier
tant la qualité de l’ensemble méritait de toucher le plus large public
possible. Aussitôt dit, en voici donc l’intégralité désormais disponible, ce
qui permet de se pencher sur ce chapitre atypique de la carrière de Sir Warren.
Ce qu’on remarque en premier est d’ailleurs la plume si
particulière de Paul Duffield qui, par ses lavis et couleurs pâles (à
dominantes mauve, sable et gris), instaure une ambiance presque éthérée, loin
du bruit et de la fureur généralement de mise dans ce genre d’univers
post-apocalyptique.
L’ensemble adoptant du coup un ton en apesanteur, presque
cotonneux, comme pour saisir l’état de choc des survivants, toujours pas remis
des évènements dramatiques survenus quelques années avant le début de la
présente histoire...
Qu’on ne s’y trompe cependant pas : on est bien chez
Ellis et sexe et violence sont bien présents au rendez-vous, au même titre que
ses éternelles obsessions sur la mutation de l’humain (on pense plus d’une fois
au Akira de Katsuhiro Otomo, aux
thèmes parfois voisins).
Mais alors que tout concourt à un titre d’anthologie, des
époustouflants décors de Duffield (qui offre une fascinante vision d’un Londres
immergé sous les flots) au genre steampunk
propice à tout débordement, l’ensemble s’avère, au final, plus attractif que
réellement abouti : le récit ayant tendance à faire monter la sauce pour,
au final, un peu laisser en plan ses personnages (et le lecteur avec).
Comme s’il manquait un volume de conclusion. Ou qu’Ellis n’avait
plus trop quoi su faire avec son intrigue - ou que ça ne l’avait pas intéressé
de la mener à bien. Une belle promesse pas entièrement tenue, en somme. En l’état
fort recommandable mais pas à la hauteur des meilleurs travaux du maître, Transmetropolitan ou Fell en tête.
Etant bien entendu qu’un
Ellis un peu décevant reste supérieur aux trois-quarts de la concurrence…
Freak Angels de Warren Ellis (scénario) et Paul Duffield (dessins) - Editions du Lombard (six volumes)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire